Pourquoi « retour » ?
Un thérapeute m’a questionné un jour : « Mais pourquoi tenez-vous tant à ce terme de « retour » ? Pourquoi revenir en arrière ? » Je n’ai pas pu m’empêcher de sentir une pointe de jugement dans ses questions. Moi, je l’aimais beaucoup cette idée de retour. Mais il avait réussi : je me questionnais. Qu’est-ce que je mettais moi, comme sens, derrière la notion de « retour » ? Si je n’y voyais pas de régression, qu’y voyais-je alors ? Comment cela se faisait-il que dans ce terme, je ne vois pas un rétropédalage mais plutôt une avancée, un élan même, quelque chose qui va vers l’avant ?
Je n’aime pas refaire. Aux marches aller-retour, je préfère les boucles. Je n’ai pas de passion pour la répétition. Pourtant, je me sens comme un poisson dans l’eau avec l’idée du retour. J’aime ce qu’il me murmure à l’oreille : une proposition de présent, d’ancrage, une invitation au questionnement, une ouverture vers une clairière où l’essentiel fondateur serait déposé. Le retour pour moi, n’est pas une fin mais un début. Le point de clarté après l’ascension, après la réflexion, après parfois l’égarement ou la souffrance. Le moment de la continuité ou du changement, tant qu’il y a alignement.
Je n’invite donc pas au retour pour que la vie se fige, pour que l’on arrête de marcher et de chercher.
J’invite au retour pour ouvrir en grand, pour aller chercher ce qui compte vraiment vraiment vraiment.
Ce mot me procure une grande joie. Vous savez ? La grande joie de la justesse.
J’ai fait l’expérience du retour, de plein de manières différentes. Retour à la maison, retour sur les terres de mon enfance, retour sur moi, retour sur ma vie, retour sur mes expériences, j’en passe – le retour ne se nomme pas toujours. J’ai connu des retours joyeux, avec des tablées et des rires, et des retours sombres qui creusaient en faisant mal. De chacun d’eux, je crois que j’ai appris. Je les aime pour les questions qu’ils m’ont posé, tous les changements qu’ils m’ont invitée à faire, toutes les fondations qu’ils m’ont permis de découvrir et consolider, et pour tous les départs qu’ils m’ont permis de prendre.
Parmi les retours qui comptent pour moi, en voici deux :
Le premier est un retour au récit.
Depuis des années, j’éprouve à quel point le récit est structurant et aidant. Si je propose un retour au récit, c’est parce que je crois au fait que revenir sur, revenir à ses sources fondatrices, ses ressources, revenir à soi, permet d’aller vers. Je crois que se relire permet de se relier intimement.
Je continue donc, comme depuis plus de 15 ans, à vous accompagner par le récit :
- en vous écoutant pour vous raconter dans des articles, des magazines, des livres,
- en vous écoutant pour révéler et nommer votre singularité propre et donner des contours à votre identité et votre communication.
- Et nouvellement, en vous écoutant en consultations individuelles pour vous aider dans certains passages de vos vies pour lesquels vous ressentez le besoin de réajuster votre récit personnel. Pour cela, je travaille avec les pratiques narratives.
Le second est un retour au refuge.

Celui-ci propose lui aussi de questionner ce qui compte vraiment pour soi mais il prend une autre forme que celle du récit puisqu’il s’agit du nom de notre atelier de conception et construction de tiny houses et cabanes en bois, fondé avec mon mari Xavier qui est charpentier.
En famille, nous avons vécu en cabane et auto-construit notre maison en bois, dans la forêt. Pour des raisons très variées, qui relèvent autant du champ de l’intimité que des champs écologique, économique, urbanistique et social, nous croyons très fort en ces formes d’habitat plus souples, plus légères que sont les micro-habitats en bois, avec ou sans roues.
L’atelier a déjà livré ses premières tiny house et cabanes en A. De nouveaux projets arrivent ; c’est pour les mener à bien et pour poser les fondations qui nous permettront de monter un atelier solide et porteur de sens que nous sommes partis mener quelques explorations apprenantes, en famille, avec une première halte au Canada jusqu’à la fin de cette année.
Celles et ceux qui me lisent depuis plusieurs années savent que j’ai déjà échangé avec le philosophe Marc Halévy. Au sujet du retour, ce dernier m’écrivait il y a quelques temps : « la sève retourne aux racines pour refaire son plein d’énergie avant de poursuivre sa pousse vers le plus haut et le plus fructueux. »
Je vous souhaite de mener de féconds retours !